France: Réforme des retraites - ouverture surprise de Macron sur l'âge de départ

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Les Echos (27.08.2019) Le président de la République a indiqué lundi soir privilégier « un accord sur la durée de cotisation plutôt que sur l'âge » de départ à la retraite. Ce qui remet en question l'instauration d'un âge pivot à 64 ans, préconisée par le rapport Delevoye sous peine de décote.

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C'est une petite bombe qu'a lâchée Emmanuel Macron à la fin de son intervention sur France 2 depuis Biarritz lundi soir, en clôture du G7. Interrogé sur la réforme à venir des retraites et les critiques sur l'instauration d'un âge du taux plein (ou âge pivot) à 64 ans, le chef de l'Etat a indiqué « préférer qu'on trouve un accord sur la durée de cotisation plutôt que sur l'âge », dans les discussions à venir avec les partenaires sociaux. Il a d'ailleurs évoqué le terme de « négociations » avec ces derniers, pour appuyer son ouverture.

Dans son rapport préparatoire à la réforme paru le 18 juillet,  le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye avait préconisé cet âge d'équilibre à 64 ans  : l'âge légal de départ serait maintenu à 62 ans, mais une décote de 5 % par an s'appliquerait pour ceux qui choisiraient de partir avant 64 ans. Inversement, une surcote similaire serait accordée pour ceux prolongeant au-delà de 64 ans.

Eviter des départs trop précoces

Pourquoi des incitations aussi fortes ? Parce que le gouvernement craint que dans le futur système universel de retraite par points, les salariés partent dès qu'ils le peuvent, à 62 ans, alors que dans le système actuel, il faut aussi avoir cotisé suffisamment de trimestres pour bénéficier du taux plein. Cette durée de cotisation minimum (sous peine là encore de décotes), qui est de 41,5 annuités aujourd'hui et qui doit passer progressivement à 43 ans (réforme Touraine), devait en effet disparaître dans le nouveau système.

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Or le président de la République a rouvert le dossier de façon spectaculaire lundi soir en affirmant sa préférence pour la durée de cotisation, plus juste selon lui : « Si vous avez un accord sur la durée, si vous commencez plus tard, vous finissez plus tard, et quand vous commencez plus tôt vous partez plus tôt », a-t-il plaidé. Le relèvement de la durée de cotisation avait été approuvé par la CFDT dans le cadre de la réforme Fillon de 2003 en échange de départs anticipés pour ceux ayant commencé à travailler très jeune.

Cette option du maintien d'une durée minimum de cotisation dans le système par points  avait en réalité été largement étudiée ces derniers mois au sein de l'exécutif . Et elle est restée longtemps en balance avec le choix de l'âge pivot à 64 ans, qui s'apparente pour les syndicats à un relèvement de fait de l'âge de la retraite.

La synthèse du rapport Delevoye (relue de très près par le gouvernement) ne fermait d'ailleurs pas complètement la porte : « Cet âge [du taux plein, NDLR] peut dépendre, comme aujourd'hui, d'une durée de cotisation ou être le même pour tous, à l'exception des personnes qui peuvent bénéficier d'un départ anticipé. C'est ce second choix qui est proposé par le haut-commissaire car il correspond davantage aux objectifs d'équité et de solidarité du système universel », était-il écrit.

Nouvelle donne pour la concertation

Les partenaires sociaux doivent être reçus à Matignon les 5 et 6 septembre sur le dossier des retraites. Ils craignaient un simulacre de concertation. La déclaration surprise d'Emmanuel Macron montre que le jeu est plus ouvert que prévu. Le chef de l'Etat a aussi insisté sur le fait que des solutions devraient être trouvées pour ne pas pénaliser certaines professions risquant d'être « lésées » dans la réforme : infirmiers, aides-soignants, enseignants. « Il n'y aura pas de réforme des retraites tant qu'on n'aura pas bâti une vraie transformation de ces professions », a-t-il assuré.

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Emmanuel Macron est en revanche resté ferme sur la nécessité d'avoir un système des retraites à l'équilibre financier en 2025, année de début de mise en oeuvre de la réforme. Cela pourrait justement passer par une accélération de l'augmentation de la durée de cotisation à 43 ans : au lieu d'intervenir d'ici à 2035, celle-ci serait effective beaucoup plus vite.