Les Echos (25.07.2019) Après les préconisations de Jean-Paul Delevoye pour la réforme du système de retraite, le Premier ministre, Edouard Philippe, doit préciser le calendrier de la réforme. Un nouveau cycle de concertation est prévu. Les syndicats ont une longue liste de sujets à aborder.
Réforme des retraites : la « boutique » ferme pour quelques semaines, période estivale oblige. Mais avant cela, Jean-Paul Delevoye s'est rendu à l'Assemblée nationale, ce mercredi. Six jours après la remise de ses préconisations sur la création d'un régime de retraite universel , le haut-commissaire est venu répondre aux questions des députés de la commission des Affaires sociales. « Il ne s'agit pas d'une énième réforme des retraites, mais d'un véritable projet de société », a prêché l'infatigable évangéliste, face à un auditoire recueilli et bienveillant.
De LR à la France insoumise, les députés ont salué « l'appétence » de Jean-Paul Delevoye pour le dialogue. Pendant près de trois heures, ils l'ont interrogé sur la transition entre l'ancien et le nouveau système, la décote avant 64 ans, l'avenir des réserves financières des régimes, les perdants et les gagnants . Ils ont aussi évoqué des situations particulières telles que le régime spécial des avocats ou des médecins, la situation des proches aidants, le cas des enseignants ou encore des aides-soignants… Autant de questions qui restent encore ouvertes.
Reprise des travaux fin août
Au passage, Jean-Paul Delevoye a expliqué que le Premier ministre, Edouard Philippe, livrerait « probablement » un communiqué ce jeudi, pour préciser les suites de la réforme. On sait déjà qu'un nouveau cycle de concertations tous azimuts, partenaires sociaux et citoyens, doit s'ouvrir à la rentrée, avant le dépôt d'un projet de loi, qui interviendra peut-être en novembre, sinon plus tard. Pour ouvrir cette séquence, le chef du gouvernement « nous invitera probablement la dernière semaine d'août sous son autorité », afin d'évoquer « les responsabilités, le calendrier, les thématiques », a ajouté le haut-commissaire.
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Les partenaires sociaux spécialistes de la retraite connaissent donc à présent la date de fin de leurs vacances… et de reprise de la concertation commencée en avril 2018. Après un week-end passé à éplucher le rapport Delevoye, toutes les organisations patronales et syndicales auront été reçues par le haut-commissaire entre lundi et jeudi matin. Elles auront pu énumérer les sujets qui fâchent, en présence de représentants de Matignon et du ministère des Solidarités.
Les points de vigilance des syndicats
Principal point d'achoppement pour les syndicats, la mise en place d'un nouvel « âge de taux plein » à 64 ans . La CFDT a redit qu'elle ne voulait pas d'une référence unique. La mise en oeuvre de cette mesure en 2025, qui nécessite a priori une montée en charge à partir de 2021, suscite également l'inquiétude. Face aux députés, Jean-Paul Delevoye a expliqué que l'application des 64 ans à la génération 1963, la première concernée par la réforme, n'était pas gravée dans le marbre.
La CFDT a évoqué une longue liste d'autres sujets à débattre, dont l'extension des critères de pénibilité - que le Medef rejette -, le développement de la retraite progressive, la réforme du minimum de pension. Il faudra aussi discuter des modalités de transition - « un sujet politiquement crucial, à regarder de près », selon le négociateur Frédéric Sève -, et « être un peu imaginatif pour construire une gouvernance moins étatique ». Le syndicat veut également parler des politiques d'accompagnement dans la fonction publique, notamment les revalorisations salariales indispensables pour les soignants à l'hôpital.
De son côté, Philippe Pihet, chez FO, hostile au principe même de la réforme, s'est attaché à débusquer les loups. « C'est une monstruosité, il y a 98 % de zones d'ombre dans ce rapport », s'alarme-t-il. La revalorisation des salaires portés au compte, censée être plus avantageuse ? « Ce sera sur la base du revenu moyen par tête, un indicateur qui n'existe pas encore », se méfie-t-il. FO sera aussi très vigilante sur le sort des carrières longues et des catégories actives.