[Point de vue] France: La fusion Agirc-Arrco va pénaliser les cadres les moins bien payés

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Les Echos (24.05.2018) Avec la fusion des deux caisses de retraite complémentaire Agirc et Arrco, les cadres rémunérés en dessous de certains seuils risquent de se retrouver lésés.

 

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Avec la fusion des deux caisses de retraite complémentaire Agirc et Arrco, les cadres rémunérés en dessous de certains seuils risquent de se retrouver lésés.

Décidée par les partenaires sociaux dans le cadre d’un accord daté du 30 octobre 2015, la fusion des deux caisses de retraite complémentaire - Agirc et Arrco - prendra effet au 1er janvier 2019.

À cette date, la retraite des salariés et des cadres dépendra d’une seule et même caisse nommée pour l’occasion «Agirc-Arrco». Bien que cette appellation laisse sous-entendre une continuité dans la gestion des caisses de retraite, il en sera tout autre pour les sociétaires de la future Agirc-Arrco qui verront le système de calcul de leurs droits être uniformisé.

Cette évolution de la gestion des retraites complémentaires entend bouleverser un système unique en Europe auquel les Français restent très fortement attachés et dont les répercussions ne pourront être évaluées que sur le moyen terme.

Deux objectifs

Si cette réforme structurelle s’inscrit dans la lignée des mesures entreprises depuis 10 ans pour réviser le système de retraite français, elle poursuit également deux objectifs essentiels.

Tout d’abord, celui de simplifier la gestion des retraites complémentaires obligatoires via l’uniformisation des cotisations de ces catégories socioprofessionnelles en deux tranches, celleconcernant les revenus allant jusqu’à 39.000 euros brut annuel (tranche 1) et celle concernant les revenus qui y sont supérieurs (tranche 2).

> Lire aussi : L'Agirc-Arrco se rapproche de l'équilibre

Ensuite, celui de mutualiser les ressources financières des deux caisses et, avec cela, sauver l’Agirc dont le régime unique en Europe est en difficulté, en raison du vieillissement de ses cotisants et du ratio actifs/retraités trop bas pour assurer la continuité du versement des pensions aux ayants droit.

Pour autant, sauvetage et simplification ne font pas bon ménage, et si ces deux mesures sont nécessaires, faire converger deux approches différenciées du calcul des retraites ne peut se faire qu’au détriment d’une des catégories socioprofessionnelles concernées.

Suppression de la GMP

À ce jeu, ce sont donc les cadres dont les revenus sont inférieurs ou s’établissent légèrement au-dessus des 39.000 euros brut annuels qui pourraient se retrouver lésés par cette mesure. Pour l’expliquer, il faut prendre en compte deux facteurs.

Tout salarié est soumis à une cotisation en euros variant en fonction de son revenu (7,75 % pour la part du salaire jusqu’à 39.000 euros, et 20,25 % au-dessus). Le montant cotisé à l’année permettra ensuite d’acheter des points, et c’est la somme de ces points cumulés et leur valeur qui déterminera la retraite complémentaire que recevra le cadre aux termes de son activité professionnelle.

Légalement, le cadre est tenu d’obtenir un minimum de 120 points de retraite dans l’année, et c’est l’Agirc qui détermine le montant minimal à cotiser pour acquérir ces points. En 2017, le seuil minimum de salaire a été fixé à hauteur de 43.337,76 euros brut dans l’année. Pour tous les cadres se trouvant en deçà, une compensation leur était attribuée, la garantie minimale de points (GMP) permettant d’atteindre les 120 points demandés.

> Opinion : Fusion Agirc-Arrco : la retraite des cadres risque de baisser dans un an

La réforme Agirc-Arrco prévoit tout bonnement la suppression de la GMP, ce qui signifie que les cadres avec un salaire en dessous de ce seuil se trouveront pénalisés. Par ailleurs, au 1er janvier 2019, les points Agirc vont être convertis en points Agirc-Arrco et se baseront sur une valeur équivalente au point Arrco. Au moment de cette transformation, la valeur en euros des droits acquis sera maintenue. Toutefois, il est aujourd’hui difficile de savoir si cette équivalence des droits perdurera sur le long terme.

Il est difficile de ne pas y voir le début d’un bouleversement profond du système de retraite à la française à bout de souffle. Cette fusion de deux entités différenciées s’annonce comme un avant-goût de la réforme des retraites voulue par le Président Emmanuel Macron et prévue pour l’année 2019. Cette réforme vise à instaurer un régime vieillesse de base unique en points et sonnerait le glas des 37 régimes spéciaux de retraite.